Le 22 mars, Guylain Nyembo, directeur de cabinet du chef de l’État, a entamé les travaux de réévaluation du contrat sino-congolais signé en 2008. Selon les premières informations communiquées, seuls 300 millions sur les 822 millions de dollars américains libérés par la Sicomines ont été retrouvés. Le problème est plus profond et ne se limite pas au seul contrat sino-congolais. Il trouve sa source dans un modèle économique inadéquat, dans la corruption structurelle généralisée et dans un État de droit inefficace.
Les problèmes soulevés dans le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) vont au-delà de la Sicomines et touchent à l’ensemble du secteur extractif congolais. Plusieurs investigations, notamment celles de Congo Hold Up, notent, par exemple, que la corruption et la mauvaise gestion au sein des sociétés minières privent la RDC d’une grande partie de ses recettes budgétaires.
À titre d’exemple, un rapport de la coalition Le Congo n’est pas à vendre (CNPAV) estime qu’entre 2003 et 2021, la RDC aurait perdu 1,95 milliard de dollars américains à cause de la prédation dans le secteur extractif. Ce montant aurait pu financer la construction de plus de 8 000 kilomètres de routes asphaltées, plus de 10 000 écoles et de financer l’accès de 21 millions de personnes aux soins de santé de base.
Mais ceci n’est qu’une simple illustration des maux qui privent la RDC d’un développement durable et inclusif.
Le modèle économique congolais est resté en effet inchangé depuis l’époque coloniale. Son économie extravertie est caractérisée par les voies de communication orientées vers l’extérieur et qui ont pour principal rôle l’acheminement des matières premières brutes à l’extérieur du pays et l’importation des produits finis.
Naturellement, cette dépendance excessive sur les exportations rend le Congo vulnérable aux fluctuations des prix des matières premières. Donc, la santé macro-économique du pays dépend de facteurs que la RDC ne peut pas contrôler. Pire encore, bien que le secteur extractif congolais contribue à 46 % au budget national, les retombées économiques échappent au trésor public à cause de la prédation, la mégestion et les détournements par certaines élites politiques congolaises, mais aussi par des hommes d’affaires étrangers et des multinationales.
En outre, en dépit de la patrouille financière menée par l’IGF qui a non seulement permis aux régies financières de mobiliser les recettes au-delà de leurs assignations, et de révéler l’ampleur de la corruption structurelle généralisée en RDC, la justice congolaise semble être dépourvue de ses capacités pour véritablement punir les corrompus et les corrupteurs. Plusieurs politiques inculpés par le passé dans les cas de corruption sont libres aujourd’hui et certains continuent d’occuper des postes à responsabilités dans les institutions du pays.
Si des efforts significatifs ne sont pas fournis pour mettre le modèle économique du pays à jour et, surtout, dépolitiser la justice pour qu’elle puisse enrayer la machine de détournement, les travaux de réévaluation en cours n’auront qu’un effet mineur sur le développement économique du pays.
Jacques Mukena, Ebuteli