Mame Penda Diop a 39 ans. Mariée et femme de 4 enfants, elle travaille au sein des Nations-Unies depuis 2016. Policière de nationalité sénégalaise depuis 2006, sa carrière est une passion et un rêve. Du Sénégal à la République Démocratique du Congo par le Mali, Penda Diop prend toujours plaisir de servir pour défendre les femmes et les enfants malgré les difficultés professionnelles et la vie loin de sa famille. À l’en croire, la stigmatisation liée au genre n’est pas un frein à l’exercice de ses fonctions.
Fine de silhouette et élancée de taille, Madame Mame Penda Diop est également une passionnée des fleurs.
Dans son Bureau situé au Camp Jampar (ancienne base du contingent Sénégalais de la Police de la MONUSCO à Beni, Est de la République Démocratique du Congo), Penda Diop consacre des journées entières à servir pour les droits des femmes et lutter contre les violences basées sur le genre au milieu des bouquets de fleurs et d’ordinateurs rangés sur une longue table dans un coin d’une grande salle qui lui sert de bureau.
Responsable de la Section Genre, enfants et lutte contre les abus sexuels au sein de la Police de la MONUSCO dans le grand Nord, Penda Diop travaille au quotidien pour la diminution des abus à l’égard de la femme et des enfants de la région de Beni en coordination avec les autorités locales, les organisations non gouvernementales et les associations féminines locales.
Installée dans la zone depuis deux ans, Penda Diop se veut une habitante de Beni, cette région agricole victime des attaques terroristes des Forces Démocratiques Alliés, un mouvement terroriste radicalisé auteur d’environ 50 milles morts selon les rapports de la société civile locale.
Le parcours de Madame Diop commence au Commissariat Central de la police de Dakar au Sénégal. Après sa réussite au concours d’entrée à la police, elle exerce au sein de la section des accidents. Son parcours au pays se poursuit à la sûreté urbaine locale où elle intègre la brigade anti criminelle avant d’être affectée au sein de la section de centralisation des fichiers, un département qui s’occupe de la confection des cartes d’identité et d’électeurs, mais également de l’organisation des élections.
Un métier inconnu, devenu une passion et un rêve
Au départ, madame Penda Diop ne rêvait pas devenir policière.
« C’est un métier que je ne connaissais pas bien, mais par la grâce de Dieu j’ai réussi le concours, je suis entrée à la police. Je suis fière », se souvient-elle.
Une fierté à pérenniser parmi des milliers d’hommes malgré les préjugés sociaux liés au genre et à la rareté du personnel féminin au sein de la police de son pays. En effet, Diop intègre la police dix ans plus tard après le recrutement du dernier groupe des femmes. Confiante, elle n’a jamais senti de stigmatisation.
« Quand nous sommes entrées à la police, nos collègues hommes nous ont accueilli à bras ouverts. J’ai pas senti la stigmatisation. Pour moi dans la vie, les questions de genre masculin ou féminin ne me traversent pas l’esprit. Je suis telle , et je dois travailler comme il faut », affirme-t-elle.
Cette attitude permet à Penda Diop d’exercer plusieurs tâches au bénéfice des communautés locales. Ils s’agit d’abord des planifier et coordonner des activités avec d’autres sections de la mission onusienne avant de se rendre sur terrain pour rencontrer les femmes et enfants, non seulement à fortifier mais également à aider à recouvrir leurs droits. Son département travaille également avec la Police Nationale Congolaise pour s’assurer de l’application des recommandations en matières des violences basées sur le genre conformément aux principes des Nations-Unies.
« Nous appuyons les structures sanitaires et assistons les victimes, nous aidons les populations vulnérables particulièrement les femmes et les enfants », se réjouit-elle.
Une mission difficile à exercer loin de son mari et de ses enfants. Parfois les nuits semblent longues pour Madame Penda Diop après une demande de son implication personnelle pour résoudre un besoin familial. De Dakar à Beni, seul le cœur et l’esprit peuvent intervenir. Parfois elle a envie de retourner au pays mais face au devoir, pas d’autre choix.
« Le fait de s’éloigner seulement de sa famille n’est pas facile. Je suis une femme mariée avec des enfants. Même au pays, me réveiller tous les matins et me rendre au travail ;compiler les tâches professionnelles et familiales. Venir dans la mission et travailler à plusieurs kilomètres de ma famille n’est pas du tout facile. Je remercie mon mari qui est devenu père et mère en s’occupant des enfants. À chaque fois qu’il appelle, ce sont des enfants qui sont malades. Un enfant qui n’est pas vite rentré à la maison, ça ne me laisse pas tranquille », s’exclame-t-elle.
À cela s’ajoute des troubles liés aux différentes manifestations contre le système de Nations-Unies.
« Même chez moi il y a des mauvais souvenirs. Entre la population et la police, souvent il n’y a pas bon ménage. Je suis ici depuis 2022. Il y a des mauvais souvenirs mais je ne veux pas les citer, car c’est notre travail », renchéri-t-elle.
Un sacrifice pour la femme congolaise
Au cours de son exercice en République Démocratique du Congo, Penda Diop a rencontré plusieurs femmes et enfants. Leur quotidien lui a appris non seulement des leçons de vie positives mais a affermi sa détermination. D’où, un appel à l’unité pour consolider les acquis de la mission onusienne mais également la poursuite de la lutte contre les violences basées sur le genre. Elle reconnait toutefois qu’il n’est pas possible d’éradiquer tout le mal qui ronge la femme congolaise dans ce secteur.
« Je suis femme de Beni. Le message que je peux adresser à la femme de Beni est qu’elle soit persévérante. Elle doit intensifier des campagnes de prévention contre les violences basées sur le genre. Il est souvent dit que la sécurité commence par soi-même. Elles doivent mettre en œuvre des politiques efficaces de soutien aux femmes. N’essayons pas d’imiter les hommes. Ayons confiance en nous en tant que femmes », conclut-elle.
Après la police, il n’y aura que la police pour madame Penda Diop. Après la mission en République Démocratique du Congo, elle souhaite rentrer au Sénégal avant de revenir à Beni sous une autre casquette. Surtout celle de responsable d’une organisation de défense des droits de la femme. Une femme qui ne connaîtra pas de stigmatisation.
Benjamin Sivanzire