Le climat social dans le secteur de la santé publique en République démocratique du Congo (RDC) s’assombrit davantage. Ce vendredi 3 janvier 2025, lors d’une assemblée générale à Kinshasa, le Syndicat national des médecins (Synamed) a annoncé une intensification de sa grève sous une nouvelle forme baptisée « hôpitaux sans médecins ».
Ce mouvement radical débute ce samedi 4 janvier et restera en vigueur jusqu’à la satisfaction complète des revendications des médecins.
Patrick Boloko May, secrétaire exécutif provincial du Synamed à Kinshasa, a justifié cette escalade en dénonçant le non-respect des engagements pris par le gouvernement.
« Le gouvernement de la République a payé, le 2 janvier 2025, un mois sur les trois attendus, mais cela avec une couverture partielle du territoire. De plus, l’alignement à la prime de risque pour 1 000 médecins n’est toujours pas effectif », a-t-il déploré.
La situation est particulièrement inégale : seuls les médecins de Kinshasa ont perçu ce paiement partiel, laissant les praticiens des 25 autres provinces sans solution.
Face à cette gestion jugée inadéquate et discriminatoire, le Synamed a décidé de hausser le ton en adoptant une stratégie de grève plus incisive.
Dans le cadre de l’opération « hôpitaux sans médecins », les services médicaux seront drastiquement réduits. Seules les urgences seront prises en charge, et cela dans un nombre limité d’hôpitaux selon un calendrier préétabli :
⁃ Samedi 4 et dimanche 5 janvier : Hôpital Général de Référence (HGR) N’djili et Centre Médico-Éducatif (CME) Bumbu.
⁃ Lundi 6 et mardi 7 janvier : HGR Kinkole et Clinique Ngaliema.
⁃ Mercredi 8 et jeudi 9 janvier : HGR Kintambo et Centre Universitaire de Kinshasa (CUK).
⁃ Vendredi 10 janvier : Clinique Kinoise et CME Ngaba.
Une réunion d’évaluation est prévue le samedi 11 janvier 2025 pour analyser l’évolution du mouvement et décider des étapes suivantes. Cette crise intervient malgré des efforts de médiation amorcés par les ministres des Finances, du Budget et de la Santé publique.
Lors d’une réunion tenue le 30 décembre 2024, le gouvernement avait promis de débloquer des fonds via la Banque centrale pour répondre aux doléances des médecins. Ces engagements concernaient notamment le paiement des arriérés, l’amélioration des primes de risque et des conditions sociales.
Cependant, ces promesses restent largement inappliquées à ce jour, exacerbant la frustration et la colère des blouses blanches. Le Synamed estime que cette lenteur dans l’exécution témoigne d’une mauvaise foi qui compromet la santé publique.
Le mouvement du Synamed dépasse la simple question salariale. Il met en lumière les dysfonctionnements chroniques du système de santé congolais :
- Une rémunération inadéquate : Les médecins, malgré leur rôle vital, perçoivent des salaires dérisoires qui ne reflètent ni leur engagement ni les risques encourus. Des inégalités régionales criantes : La gestion différenciée entre Kinshasa et les provinces illustre un déséquilibre qui fragilise l’unité du système. Une précarité généralisée : Les infrastructures de santé, souvent insuffisantes et mal équipées, compliquent davantage le travail des praticiens.
Le Synamed exhorte le gouvernement à agir avec célérité et responsabilité pour éviter une paralysie totale du système de santé. Les patients, premières victimes de ce bras de fer, se trouvent déjà dans une situation critique. Pour mettre fin à cette crise, des actions concrètes sont nécessaires, notamment :
- Le règlement immédiat et total des arriérés sur tout le territoire. L’application de l’alignement à la prime de risque pour tous les médecins concernés. Une réforme durable visant à garantir des conditions de travail dignes et équitables dans le secteur de la santé.
L’opération « hôpitaux sans médecins » est un cri d’alarme lancé par ceux qui portent au quotidien la santé des Congolais. Elle témoigne d’un profond désespoir mais aussi d’une détermination inébranlable à exiger des réformes essentielles.
Barth NGINDU