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Gel du cobalt : la suspension des exportations de la RDC peut-elle être qualifiée de force majeure ? (Tribune de Dr. Joseph Yav Katshung)

Le Congo a récemment annoncé une suspension temporaire des exportations de cobalt. Une question cruciale se pose : cette mesure réglementaire peut-elle être qualifiée de force majeure pour les entreprises concernées ?

La République démocratique du Congo (RDC), qui produit 70 % de la production mondiale de cobalt, a récemment annoncé une suspension temporaire des exportations de cobalt. Si cette décision vise à stabiliser le marché, elle a des conséquences importantes pour les entreprises dépendantes du cobalt congolais. Une question cruciale se pose : cette mesure réglementaire peut-elle être qualifiée de force majeure pour les entreprises concernées ?

Le cas de force majeure : définition et application

    Le concept de « force majeure » fait référence à des événements imprévisibles et incontrôlables qui empêchent l’exécution des obligations contractuelles, tels que des catastrophes naturelles, des guerres ou d’autres circonstances extraordinaires. Il est souvent invoqué dans des contextes juridiques pour excuser l’inexécution lorsque des événements échappent au contrôle de la partie concernée. Dans la décision de la RDC de suspendre temporairement les exportations de cobalt, si la suspension perturbe les contrats existants, les parties concernées pourraient invoquer la force majeure en fonction des termes spécifiques de leurs accords. En fin de compte, la qualification de force majeure dépendrait des clauses contractuelles et de l’interprétation juridique dans la juridiction concernée.

    Pour les entreprises des provinces du Lualaba et du Haut-Katanga touchées par l’interdiction d’exporter, les arguments suivants pourraient étayer une réclamation pour force majeure :

    • Caractère imprévisible de la suspension. Bien que la RDC ait mis en œuvre des mesures réglementaires par le passé, la suspension soudaine et temporaire des exportations de cobalt n’était pas largement anticipée. Les entreprises pourraient faire valoir que cette action est qualifiée d’événement imprévu perturbant les opérations et les chaînes d’approvisionnement établies.
    • L’action gouvernementale comme cas de force majeure . De nombreuses clauses de force majeure incluent explicitement les « actes du gouvernement » ou les « changements réglementaires » comme déclencheurs valables. La décision de la RDC de suspendre les exportations de cobalt répond à ces critères, car il s’agissait d’une intervention réglementaire délibérée échappant au contrôle des entreprises concernées.
    • Impact sur l’exécution du contrat . Pour pouvoir invoquer avec succès la force majeure, les entreprises doivent démontrer que la suspension des exportations rend l’exécution du contrat impossible, et pas seulement gênante. Pour les industries entièrement dépendantes du cobalt de la RDC, l’absence d’approvisionnement alternatif pendant cette période renforce cette affirmation.

    Force majeure et perturbation de la chaîne d’approvisionnement . En l’absence d’accès à des sources d’approvisionnement alternatives, les entreprises peuvent faire valoir que la suspension perturbe la chaîne d’approvisionnement mondiale, ce qui a un impact direct sur leur capacité à respecter les délais de livraison, les objectifs de production et les obligations contractuelles.

    Défis

      L’argument de la force majeure n’est pas sans soulever de difficultés. Les opposants peuvent prétendre que la suspension est une mesure réglementaire délibérée prise par le gouvernement pour remédier à l’offre excédentaire du marché et stabiliser les prix. Elle n’est pas le résultat d’un événement imprévu ou incontrôlable, mais plutôt d’une intervention planifiée dans le cadre de l’autorité du gouvernement. Par conséquent, elle ne semble pas être qualifiée de force majeure. La formulation spécifique de la clause de force majeure dans les contrats déterminera en fin de compte son applicabilité.

      Conclusion

        Pour les entreprises confrontées à la suspension des exportations en RDC, invoquer la force majeure pourrait leur offrir une protection juridique contre les réclamations pour rupture de contrat. Cependant, le succès dépendra de la nature imprévue de l’événement, de la formulation des accords contractuels et du cadre juridique de la juridiction. Cette situation souligne l’importance de clauses de force majeure complètes qui tiennent compte des risques réglementaires et géopolitiques dans des secteurs instables comme l’exploitation minière. Pour les futurs accords, les entreprises devraient inclure un langage clair dans les clauses de force majeure pour couvrir les mesures réglementaires, les interdictions d’exportation ou les restrictions imposées par le gouvernement comme déclencheurs valables. Cela renforce leur capacité à invoquer la force majeure dans des situations similaires. Les entreprises doivent démontrer que la suspension rend impossible – et pas seulement difficile – l’exécution de leurs obligations contractuelles. Par exemple, s’il n’existe aucune source alternative de cobalt, les entreprises peuvent mettre en avant la perturbation complète de leurs chaînes d’approvisionnement.

        Dr. Joseph Yav Katshung

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