Maître Bitaki s’oppose à la démarche du ministre d’État en charge de la justice Constant Mutamba qui a annoncé le mercredi 30 avril que l’auditeur général des FARDC avait déposé au près du bureau du Sénat congolais le réquisitoire pour lever les immunités de l’ancien président en sa qualité du sénateur à vie. Il est reproché à Joseph Kabila, sa participation active aux activités des rebelles M23/AFC soutenus par le Rwanda.
« La procédure exige que les deux chambres du parlement doivent se réunir en congrès pour obtenir la levée des immunités de l’ancien président son titre de sénateur à vie, mais aussi pour obtenir son acquisition. Le ministre d’État en charge de la justice devrait se référer de cette démarche solennelle que dispose la constitution pour n’est pas contredire les textes fondamentaux de la RDC », a déclaré Maître Didier Bitaki.
Et d’ajouter :
« Le titre de sénateur à vie que détient Joseph Kabila est titre honorifique et constitutionnel. Il ne doit pas être poursuivi au même titre que les sénateur élus comme le souligne le ministre d’État en charge de la justice et garde de sceaux. Kabila n’a jamais battu campagne électorale pour être élu sénateur. Comment peut-il initier une démarche qui va à l’encontre de la loi ? Si Mutamba pense que Kabaila sera poursuivi de la sorte, je rappelle que le sénat ne lui a pas établi mais c’est la constitution qui l’a fait. »
Ainsi, ci-dessous, l’analyse d’un observateur averti sur le statut de « Sénateur à vie » tel que prévu à l’article 104 de la Constitution de la RDC.
Pour clarifier juridiquement, administrativement et institutionnellement, il y a cinq choses à retenir:
1. Sur le statut de « Sénateur à vie » :
a. La Constitution (article 104, al. 8) stipule : « Les anciens Présidents de la République élus deviennent de droit Sénateurs à vie. »
Ce statut leur confère pleinement la qualité de membre du Sénat, avec tous les droits, devoirs et immunités attachés à la fonction sénatoriale, sauf disposition contraire prévue expressément par la Constitution, ce qui n’est pas le cas ici. Il ne s’agit donc pas d’un simple titre honorifique.
b. Les immunités parlementaires s’appliquent donc à Joseph Kabila, comme à tout autre Sénateur.
C’est pourquoi la levée de ses immunités parlementaires par le Sénat est une exigence constitutionnelle, en vertu de l’article 107 de la Constitution, pour permettre toute poursuite judiciaire.
2. Sur les différences entre Sénateur élu et Sénateur à vie :
Vous évoquez l’absence de circonscription, de suppléants, ou de campagne électorale pour remettre en cause la légitimité de ce statut. Cela ne tient pas :
a. Le Sénateur à vie n’est pas élu, mais nommé de droit par la Constitution. Il ne dépend donc ni d’une circonscription, ni d’un processus électoral, ni de suppléants. Cela n’affecte en rien son appartenance au corps sénatorial, qui est confirmée automatiquement et juridiquement par la Constitution elle-même.
b. Le Règlement intérieur du Sénat n’invalide pas les sénateurs à vie pour absence, car leur statut découle de la Constitution, non du scrutin. L’absentéisme concerne les élus dont le mandat est populaire, pas les sénateurs à vie. Il s’agit d’un traitement distinct, reconnu dans la pratique parlementaire comparée.
3. Sur la régularité de la procédure judiciaire :
a. Conformément à l’article 107 de la Constitution, l’autorisation du Sénat est requise pour poursuivre un Sénateur en fonction (y compris à vie), sauf en cas de flagrance.
b. En demandant la levée de l’immunité parlementaire de Kabila, le gouvernement respecte donc la procédure régulière. L’omission de cette étape aurait, au contraire, constitué un vice de procédure.
4. Sur la responsabilité pénale personnelle :
Le statut de sénateur à vie ne protège pas contre les poursuites judiciaires. Il ne confère ni impunité, ni immunité à vie. Il impose seulement des garanties procédurales, notamment l’avis préalable du Sénat. Si les charges sont avérées, il pourra être poursuivi comme tout autre justiciable.
5. Message à l’intention du Ministre d’État Mutamba :
Le respect scrupuleux de la procédure, y compris la demande de levée d’immunité, prouve que le Ministre agit dans les limites de l’État de droit. Ce n’est donc ni une chasse aux sorcières, ni une instrumentalisation, mais un acte de cohérence juridique et institutionnelle, que tout constitutionnaliste digne de ce nom devrait soutenir.
Bref, vous devez retenir ceci: Joseph Kabila est bien Sénateur à vie de plein droit et non pas honoris causa. Ce statut, bien que non électif, est fonctionnel et juridiquement reconnu, et impose donc le respect des immunités parlementaires avant toute action judiciaire.
La procédure actuelle respecte ce cadre. Toute tentative de contourner la levée de son immunité aurait été juridiquement viciée.
Michel Kabeya