Coup de tonnerre judiciaire à la Haute Cour militaire de Kinshasa. Le général Ndesho Kabweno accuse un magistrat de Goma d’avoir violé le droit de la défense dans une affaire explosive d’occupation de concessions.
Une audience particulièrement tendue s’est tenue mardi à la Haute cour militaire à Kinshasa. Au cœur de la tempête : le magistrat militaire Lazare Amsini Bulaimu, président du tribunal militaire de garnison de Goma, mis en cause pour « prise à partie » dans un jugement rendu en 2022. C’est le général Ndesho Kabweno, visé par cette décision, qui a introduit la plainte à travers son conseil, Me Jean Claude Bashangwa.
« Le magistrat a faussé le droit de la défense au profit de la partie civile », a martelé l’avocat devant les juges, dénonçant une violation manifeste des droits de son client.
Le jugement controversé du 25 novembre 2022 portait sur une affaire sensible d’occupation de concessions dans la ville de Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, régulièrement secouée par des conflits fonciers.
Me Bashangwa reproche au juge non seulement d’avoir ignoré la version du ministère public, mais surtout d’avoir « modifié la nature des parcelles concernées dans le verdict final ».
« Le magistrat a introduit dans sa décision d’autres concessions qui ne figurent pas dans l’acte de renvoi du ministère public. Ce glissement est assimilable à un dol judiciaire », a-t-il précisé.
La prise à partie d’un juge militaire en fonction reste un acte juridique exceptionnel en République démocratique du Congo, surtout lorsqu’elle émane d’un officier général. Cette procédure vise à engager la responsabilité personnelle d’un juge pour faute lourde dans l’exercice de ses fonctions.
Cette affaire intervient dans un contexte où les tensions autour du foncier à Goma prennent des proportions inquiétantes, avec plusieurs officiers, politiques et investisseurs civils impliqués dans des litiges de terrain parfois sanglants.
Si la Haute cour militaire juge recevable la requête du général Ndesho, le juge Amsini Bulaimu pourrait faire face à des poursuites disciplinaires ou même judiciaires, une situation inédite pour un président de tribunal militaire de garnison.
L’audience a été suspendue pour permettre à la cour d’examiner la recevabilité de la plainte. Les prochaines audiences pourraient créer un précédent historique dans l’encadrement de la responsabilité des juges militaires en RDC.
En attendant, le dossier fait grand bruit dans les cercles judiciaires et militaires, et suscite un débat brûlant sur l’indépendance de la justice militaire et la protection des droits fondamentaux des prévenus, y compris lorsqu’ils sont membres de l’armée.