La journaliste et militante des droits humains Gracias Tshama Baya est désormais dans le viseur des services de sécurité congolais. Selon plusieurs sources proches de sa famille, cette activiste engagée, connue pour ses prises de position courageuses contre les abus des forces de l’ordre, est recherchée pour avoir dénoncé publiquement les exactions policières liées à l’opération dite « Ndobo », en cours à Kinshasa.
Lancée par les autorités provinciales pour « assainir la ville et lutter contre la criminalité urbaine », l’opération Ndobo suscite depuis plusieurs semaines de vives critiques. De nombreuses vidéos et témoignages, relayés sur les réseaux sociaux, font état d’arrestations arbitraires, de violences policières et d’extorsions commises sur des jeunes, notamment dans les communes populaires de Limete, Matete, Ndjili, Masina et Selembao.
Parmi les voix qui se sont élevées pour dénoncer ces abus figure celle de Gracias Tshama Baya. Sur son compte X (ex-Twitter) et lors de plusieurs interventions médiatiques, elle a condamné la brutalité de cette opération, qu’elle qualifie d’ »instrument de terreur contre les jeunes des quartiers pauvres ». Elle a notamment interpellé les autorités congolaises et la police nationale sur les atteintes graves aux droits humains perpétrées sous couvert de sécurité.
Mais cette posture critique lui vaut aujourd’hui des représailles. Des hommes en civil, identifiés comme appartenant à un service de renseignement, se sont récemment présentés à son domicile familial dans la commune de Lemba. Ne l’y trouvant pas, ils auraient interrogé ses proches et saisi des documents personnels. Depuis lors, Gracias Tshama Baya est introuvable. Ses proches affirment qu’elle est entrée en clandestinité « par mesure de sécurité ».
Plusieurs organisations de défense des droits humains, dont l’ONG Voix des Sans-Voix et la Ligue des Jeunes pour les Droits Humains, ont exprimé leur vive inquiétude. Elles dénoncent une atteinte grave à la liberté d’expression et appellent à la protection immédiate de la journaliste.
Dans un contexte politique tendu, où les critiques contre les dérives sécuritaires sont de plus en plus mal tolérées, le cas de Gracias Tshama Baya relance le débat sur l’espace civique en République démocratique du Congo. La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) n’a pas encore réagi officiellement à cette situation, tout comme le ministère des Droits humains et la Police nationale congolaise.