Une importante réunion de restitution et d’harmonisation s’est tenue ce mardi 20 mai dans la capitale congolaise, autour du Vice-Premier ministre, ministre des Transports, Voies de Communication et Désenclavement Jean Pierre Mbemba, en présence du gouverneur de la ville de Kinshasa Daniel Mbumba et de plusieurs représentants des secteurs concernés. L’objet de la rencontre : la future mesure de régulation de la circulation des camions, qui suscite autant d’adhésion de principe que de profondes inquiétudes.
Annoncée récemment par le gouverneur de Kinshasa, cette mesure prévoit d’interdire la circulation des camions et des opérations de livraison entre 22h00 et 5h00. Elle vise, selon les autorités, à « fluidifier le trafic et désengorger les grands axes pendant la journée ». Toutefois, comme l’ont souligné plusieurs intervenants, cette réorganisation de la logistique urbaine s’apparente à un « changement de paradigme » qui nécessite une préparation rigoureuse.
« Le passage à une économie nocturne dans des secteurs aussi sensibles que le transport et la distribution ne peut s’improviser », a déclaré un représentant du secteur logistique. Pour les participants, il ne s’agit pas de rejeter la réforme, mais d’en souligner les conditions de faisabilité. « La réussite de cette réforme dépend exclusivement de la mise en place effective des préalables », ont-ils insisté.
Parmi les points cruciaux soulevés figurent notamment « l’adaptation des cadres juridiques, y compris ceux relatifs au travail de nuit, au travail des femmes et à la sécurité des opérations de déchargement », ainsi que « la redéfinition des horaires et obligations des services publics impliqués dans la chaîne logistique ».
La question de la sécurité nocturne a également été abordée. « Il faudra organiser de manière rigoureuse les points de passage et de déchargement pour éviter tout risque d’insécurité pour les travailleurs et les biens transportés », a alerté un membre d’une association de transporteurs. Des inquiétudes ont aussi été exprimées quant à la capacité des services annexes – stations-service, banques, services de maintenance – à fonctionner efficacement durant la nuit.
Les impacts économiques d’une telle mesure s’annoncent considérables. « Ce n’est pas seulement le secteur du transport qui est concerné, mais toute une chaîne économique : industriels, commerçants, entrepôts, ports, assurances, services financiers, et jusqu’aux consommateurs« , a rappelé un cadre du ministère du Commerce.
Dans ce contexte, la majorité des participants ont insisté sur la nécessité d’un accompagnement structuré. « Il faut des mesures concrètes d’ajustement, des délais réalistes et une communication claire pour permettre aux entreprises de s’adapter« , a proposé un responsable d’organisation patronale. Le manque de préparation pourrait entraîner des « perturbations graves de la chaîne logistique, voire une paralysie partielle de certaines activités économiques ».
Afin de permettre un retour plus approfondi de chaque secteur, il a été convenu que « chaque membre transmette dans un délai de 72 heures ses observations, suggestions d’ajustement et propositions de mesures d’accompagnement en lien direct avec son domaine d’activité ». Une synthèse de ces contributions devrait être produite en vue d’un arbitrage gouvernemental final.
« Ce chantier de transformation est ambitieux et nécessaire« , a conclu un haut fonctionnaire du ministère des Transports. « Mais son succès ne dépendra que de notre capacité collective à l’aborder avec méthode, réalisme et concertation. » Le compte à rebours est lancé pour une réforme qui pourrait redessiner le visage économique nocturne de la capitale congolaise.
CKK