La création du Fonds Souverain pour la transformation des ressources naturelles en richesse durable a été saluée comme un acte fort du président Félix Tshisekedi. Mais pour Jean-Willy Bulu, économiste engagé et observateur attentif des politiques publiques congolaises, cette initiative risque de sombrer dans les méandres de la corruption et de l’incompétence qui gangrènent l’appareil étatique.
« Parfait et bravo au chef de l’État, mais malheureusement, il lui manque des experts capables de transformer sa vision en réalité », a-t-il déclaré.
Pour lui, cette démarche présidentielle s’inscrit dans la continuité d’une vision salvatrice lancée en juin 2023 : celle d’imiter le modèle chinois de développement, centré sur la valorisation des ressources naturelles et l’industrialisation. Or, regrette-t-il, cette vision forte est restée lettre morte, ignorée par les décideurs et reléguée dans les tiroirs de l’oubli.
Une vision sans architectes
L’analyste souligne un paradoxe criant : des projets porteurs sont annoncés par le sommet de l’État, mais sans les experts compétents pour en assurer la mise en œuvre. En l’absence d’une technocratie efficace, les idées innovantes sont récupérées par un système où les intérêts privés priment sur l’intérêt national.
« Rien ne se fera tant que les décideurs seront toujours dans la course au vol des millions de dollars du Trésor public et de nos ressources minérales », insiste-t-il.
Le Fonds Souverain, ajoute-t-il, pourrait devenir une nouvelle boîte noire, un instrument détourné de sa vocation initiale pour enrichir une minorité au pouvoir, comme cela a souvent été le cas dans l’histoire économique récente du pays. Il appelle donc à une véritable réforme des institutions, à l’assainissement de la gouvernance et à la mobilisation des compétences locales et de la diaspora pour donner vie à cette ambition présidentielle.
Une alerte à ne pas ignorer
Le message de Bulu sonne comme un cri d’alarme, mais aussi comme un appel à la lucidité : sans rupture avec les pratiques prédatrices, aucune vision, aussi brillante soit-elle, ne pourra transformer la RDC. Le risque est grand que ce Fonds Souverain ne devienne qu’un slogan de plus dans une République fatiguée de ses promesses non tenues.
B.A